« L’illusion d’une promesse qui ne sera pas tenue : la baisse du prix de l’électricité »
#webtube-ortf : Conformément à ses habitudes de communication, la Commission européenne enveloppe le projet d’un message positif. Ce 16 décembre, à la tribune du Parlement européen, la députée RN Pascale Piera, membre de la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie, s'est vigoureusement opposée, comme tout son groupe, au texte « Paquet réseaux » présenté par la Commission européenne. Un texte qui, selon elle, vend « l’illusion d’une promesse qui ne sera pas tenue : celle de la baisse du prix de l’électricité ».
Georges Michel. Pouvez-vous tout d’abord nous dire en quelques mots quels sont les enjeux de ce projet baptisé « Paquet réseaux » ?
Pascale Piera. Lorsque l’on s’intéresse aux normes européennes, il est absolument nécessaire de distinguer l’axe communicationnel (y compris dans le titre des textes) des dispositions précises contenues dans ledit texte.
Le 10 décembre 2025, la Commission européenne a présenté l’ensemble des mesures qu’elle entend proposer pour, selon elle, moderniser les infrastructures énergétiques européennes, et en particulier les réseaux électriques. Conformément à sa méthode habituelle de communication, la Commission enveloppe le projet d’un message positif, en l’espèce en promettant que l’ensemble des nouvelles règles proposées se traduiront par une baisse du prix de l’électricité. La déclaration de la commissaire à la concurrence, Teresa Ribera, illustre parfaitement cette méthode quand elle affirme que « ce texte est un engagement pour un avenir inclusif où chaque coin de l’UE bénéficiera de la révolution énergétique : prix bas, énergie décarbonée, réduction de la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles importés, approvisionnement sécurisé, matelas contre les chocs des prix ».
Or, quand on se penche sur le contenu technique de la proposition sur le « paquet réseaux », la réalité est tout autre.
Les mesures déclinées visent en effet à accélérer la transition énergétique, à intégrer davantage les énergies renouvelables et à réduire les délais de déploiement des infrastructures. De prix il n’est nulle question dans les dispositions auxquelles nous avons eu accès. En revanche, les Européens savent bien, aujourd’hui, que les choix catastrophiques faits jusqu’ici par la Commission, issus de la philosophie du Green Deal, ont provoqué la rapide désindustrialisation du continent, et de la France en particulier, tandis qu’ils ont littéralement appauvri les populations pour qui l’énergie est devenue un luxe.
En fait, l’examen attentif de ce projet permet en l’état d’en déterminer les objectifs réels : donner à la Commission le pouvoir de centraliser la planification des nouvelles infrastructures (y compris en lançant elle-même des appels d’offres) et accélérer les protocoles d’octroi des permis. Derrière le vernis communicationnel qui embellit cette proposition, le mouvement de fond reste inchangé : la confiscation progressive de la souveraineté des États membres, domaine après domaine, au moyen d’une extension constante des compétences de la Commission européenne.
G. M. Ce plan affiche officiellement pour ambition d’améliorer notamment les connexions de réseau à travers les Pyrénées afin de mieux intégrer la péninsule Ibérique, la connexion de Chypre à l'Europe continentale ou encore celle des États baltes en reliant la Lituanie et la Pologne. En vous opposant à de tels projets très concrets, ne risquez-vous pas de passer pour des « anti-européens » primaires et, finalement, de desservir la cause de cette Europe des patries et de projets que vous défendez ?
P. P. Non, nous ne sommes pas isolationnistes mais, au contraire, favorables à la coopération en États-nations. Dans cette optique, nous sommes évidemment favorables à tous projets bilatéraux ou multilatéraux, mais à condition que notre intérêt national, économique en particulier, soit toujours la boussole de nos décisions. De fait, la ligne rouge est de ne pas conférer à la Commission davantage de prérogatives qui viendraient amoindrir les compétences nationales et permettre à celle-ci de décider en nos lieux et places.
S’agissant des projets que vous mentionnez, et qui concernent notre pays, il est par principe utile d’étudier tout projet qui, en respectant les particularités nationales et territoriales, améliore l’efficacité du réseau électrique sans en augmenter les coûts, déjà beaucoup trop élevés. Ce que propose la Commission est différent ; il s’agit pour elle de persévérer dans le déploiement des énergies renouvelables, au mépris d’ailleurs du choix national de notre mix énergétique pourtant garanti par les traités européens. Ce déploiement entraînera d’énormes dépenses de raccordement pour un résultat aléatoire qui, loin de faire baisser les factures, les augmentera encore davantage. Cette situation est d’ailleurs très précisément décrite dans un rapport du Sénat de 2024. Au-delà des aspects techniques du texte, une analyse de l’ensemble de l’architecture normative révèle clairement que l’objectif de fond suit un agenda politique bien précis. C’est en réalité la mise en œuvre accélérée du Green Deal qui est ici poursuivie, quelles qu’en soient les conséquences. L’épisode du black-out espagnol en avril 2025 en est un exemple criant, puisqu’il trouve sa source dans la surproduction d’énergies renouvelables non absorbées par le système. Au lieu de tirer les leçons de ce déploiement frénétique, la Commission est engagée dans une fuite en avant qui néglige totalement l’énergie nucléaire, par exemple, alors qu’elle constitue pour nous une source d’énergie souveraine, pilotable et peu chère.
G. M. La Commission recommande aux États membres de faciliter encore plus les procédures d’octroi de permis de projets énergétiques renouvelables « jusqu'à ce que la neutralité climatique soit atteinte » et préconise en particulier, d’une part, une accélération de la procédure d’octroi des permis et, d’autre part, la catégorisation des infrastructures en « installations d’intérêt public majeur ». Faut-il voir dans cette recommandation une action des lobbys défendant les énergies renouvelables ?
P. P. Le lobbying est une activité qui fait partie intrinsèque du fonctionnement des institutions européennes et du processus décisionnel. On peut le critiquer à juste titre, mais c’est ainsi que Bruxelles fonctionne. La question des énergies renouvelables n’échappe donc pas à cet écosystème particulier. C’est ce qu’a démontré le scandale autour des ONG environnementales soupçonnées d’avoir été rémunérées par la Commission pour promouvoir le Green Deal auprès des députés lors des négociations sur le texte. Le Parlement européen a d’ailleurs lancé une enquête sur ces faits, il y a quelques semaines. Il convient également de noter que la forte présence numérique des députés allemands dans les commissions stratégiques (en particulier ITRE) explique les orientations prises en la matière, qui se heurtent aux intérêts français. C’est d’ailleurs cette situation qui explique que nous ayons, un temps, négligé notre énergie nucléaire. La soumission aux énergies renouvelables, coûteuses et peu efficaces, est ainsi le résultat de ces facteurs. Il nous appartient donc, autant que faire se peut, de rétablir dans le débat l’intérêt national. Nous savons qu’il en va de la survie de notre économie. C’est la voie que notre délégation au sein du groupe Les Patriotes défend.
G. M. Ce projet est estimé à 1.200 milliards jusqu’en 2040. Qui paiera ?
P. P. Pour financer ses nouveaux projets, la Commission européenne propose notamment des partenariats public/privé via un instrument dénommé « mécanisme pour l’interconnexion en Europe » (MIE). Pour la période 2021-2027, ce mécanisme prévoyait une enveloppe de 5,8 milliards d’euros ; pour la période 2028-2034, cette enveloppe atteindra 29,9 milliards d’euros. Le reste de l’enveloppe sera donc évidemment financé par les contribuables et les consommateurs. Il est d’ailleurs particulièrement édifiant de constater que dans sa propre communication sur le MIE, la Commission précise qu’en « s’appuyant sur le cadre actuel [cela] pourrait entraîner une hausse des prix pour les consommateurs ».
En fait, les consommateurs n’observeront pas de sitôt une quelconque baisse de leurs factures, puisqu’il est désormais établi (le rapport du Sénat précité est éclairant, à cet égard) que les énergies renouvelables coûtent bien davantage qu’elles ne rapportent.

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